Qui Sommes-nous '...
On donne volontiers
le titre de prêtre-ouvrier à tout
prêtre qui sait se faire proche et compréhensif, attentif à la vie
ordinaire
et aux difficultés des petites gens, même s?il n?exerce pas un emploi
salarié. Pourtant, nombre de prêtres au travail ne souhaitent pas
s?appeler
ainsi, soit qu?ils travaillent dans d?autres secteurs d?activité, soit
qu?ils veuillent garder leur indépendance personnelle.
Par contre, près de
six cents prêtres en France, deux
cent cinquante dans les pays limitrophes (Allemagne, Autriche,
Belgique,
Espagne, Italie, Portugal, Suisse) et quelques-uns dans le Tiers Monde
revendiquent cette appellation, que leur donnent leurs camarades de
travail et
qu?ils aiment abréger en «P.O.». Ils s?organisent entre eux en totale
autonomie pour leur réflexion commune, leur expression publique et leur
formation permanente.
Du fait de
l?évolution récente des entreprises et de
l?économie, les prêtres-ouvriers ont dû diversifier leurs insertions
professionnelles, et ils ont cessé d?exercer uniquement des métiers
manuels.
Syndiqués pour la très grande majorité, ils assument souvent des
responsabilités au sein de leurs entreprises ou de leur profession.
Seule une
petite minorité d?entre eux adhèrent à un parti politique. Du fait de
leur
âge, la moitié d?entre eux ont dû cesser leur activité professionnelle
pour s?investir dans des associations. Cette proportion est appelée à
augmenter rapidement dans les années à venir. Les prêtres plus jeunes,
bien
moins nombreux, tendent à orienter leur action en faveur des victimes
de
l?exclusion sociale.
Prêtres diocésains
pour la plupart, issus de groupes
voués à l?apostolat en milieu ouvrier tels que la Mission de France, le
Prado, les Fils de la Charité, religieux de différentes provenance, les
prêtres-ouvriers
n?ont jamais voulu former un nouvel ordre religieux ni une congrégation
à
part. Ils sont associés comme partenaires à la Mission ouvrière. Ils
continuent à relever de la responsabilité de leurs évêques respectifs.
C?est en effet un
vote unanime des évêques français,
avec l?accord du pape Paul VI, le 28 octobre 1965, lors de la
dernière
session du concile de Vatican II (1962-1966), qui a relancé des
prêtres
au travail salarié après le coup d?arrêt imposé par le pape
Pie XII,
le 1er mars
1954, aux premiers prêtres-ouvriers, qui ne s?y sont pas tous soumis.
Rapidement, surtout à la faveur du mouvement de «dé-clergification» qui
animait les jeunes prêtres français des années 1968-1975, leur nombre
dépassa
toutes les prévisions et approcha le millier, alors que, dans la
première période
(1945-1954), ils n?avaient jamais dépassé la centaine.
À l?origine de
cette initiative apostolique, il n?y
eut pas, comme c?est souvent le cas, un fondateur prophétique mais une
série
d?expériences historiques, imposées par les circonstances de la Seconde
Guerre mondiale. Elles mirent un grand nombre de prêtres, pendant des
mois et
des années, au contact des hommes ordinaires, dans la vie quotidienne
particulièrement
difficile des camps de prisonniers de guerre ou du service du travail
obligatoire. Ce fut pour beaucoup une découverte marquante, qui fit
souhaiter
à quelques-uns, comme une condition de réalisme et de crédibilité de
leur
apostolat, de continuer à partager les conditions de vie des gens du
peuple,
dans la lignée d?une longue tradition de travail manuel, jamais
complètement
disparue dans l?historie du clergé séculier et de divers ordres
religieux.
Le contraire surprendrait dans une Église qui se réclame du Christ
«charpentier
de Nazareth» et de l?apôtre Paul, qui travaillait de ses mains pour
«annoncer
gratuitement l?Évangile».
Ils y furent
encouragés par les recherches de Henri
Godin, fondateur de la Mission de Paris (1943), l?impulsion du cardinal
Suhard,
archevêque de Paris (mort en 1949), et la réflexion théologique du père
Chenu, qui légitimait leur sacerdoce, cela malgré la méfiance,
l?hostilité,
les dénonciations de catholiques influents, les craintes et les mises
en garde
d?évêques français et du Vatican.